Contexte

Cinq ans déjà que trois fragiles nations sont coupées du reste du continent par un brouillard gris-bleu, dense et presque infranchissable. Il est apparu on ne sait trop comment un beau jour, engloutissant entièrement le royaume de Boletaria.
Au départ, des tentatives furent entreprises afin de le faire disparaître. Ou au moins de stopper sa lente progression. Des armées entières y ont pénétrées, sans jamais en revenir. Les plus grands érudits et mages l'ont étudié, sans parvenir à le dissiper. Des fidèles s'y sont recueillis par milliers, mais les dieux sont restés sourds à leurs prières.

Que faire dans ce cas ? Au fil des ans, les gens se sont mis à accepter l'idée de vivre avec cet étrange phénomène. Était-il si néfaste ? Ne protégeait-il pas les trois nations survivantes de leurs voisins plus puissants ?
Certains ne baissèrent pas les bras. Parfois, un fou s'y aventurait, pensant pouvoir lever une malédiction qui régnait sous le royaume englouti par la brume. Mais jamais ces héros ne revenaient indemnes. Les plus chanceux parvenaient à revenir dans leurs foyers estropiés, à moitié fou, la mémoire bancale. Et surtout, marqués d'un étrange sceau. Un sceau qui peu à peu les transformait en bêtes avides de sang, incontrôlables, qui perdaient toute humanité. Ils étaient abattus sommairement, et plus personne ne les évoquait.

Chacun faisait comme si le brouillard n'avait jamais fait disparaître Boletaria. Comme si les quelques survivants du royaume déchu mentaient, inventaient des fables à propos de gens devenus fous et de monstres qui rôdaient, de démons sortis tous droits des contes.

Il y a quelques semaines, un village entier disparaît sous la brume. Personne ne s'en émeut. Il ne s'agit que d'un cas isolé. Puis la chose se répète. Voilà que le brouillard semble être doté d'une faim nouvelle, prêt à engloutir de nouveaux malheureux. On retrouve quelques survivants, qui sont parvenus à s'extirper de cet endroit maudit. Mais ils portent tous la marque. Alors on les exécute sommairement, dissimulant leurs cadavres aux honnêtes gens, avant qu'ils ne provoquent plus de tracas.

Les trois nations ne réagissent pas. Ne savent que faire, quels mesures prendre. Des flux massifs de réfugiés se déversent vers l'intérieur des terres. Des révoltes éclatent un peu partout. À l'est, le brouillard. Au nord, des terres sauvages et inhospitalières. Nul part où fuir, ou se cacher. Certains se tournent vers la prière, d'autres cherchent un lieu sûr, ou continuent de vivre comme si de rien n'était. Puis il y a ceux qui sont prêts à affronter ce qui se cache au coeur de brouillard. Mais bien peu en ressortiront vivants.